12
Mai

Exposition lames d’excellence, les Meilleurs Ouvriers de France à la Cité des couteliers Thiers

Coffret couteaux mof

Couteau libre concours mof

Couteau pliant multi-lame concours mof

Couteau fixe intégral concours mof

La Cité des couteliers de Thiers organise cette année une exposition sur les couteliers Meilleurs Ouvriers de France de la région du Puys de Dôme du 19 mai 2023 au  20 mai 2024. J’ai l’honneur d’être invité à cette prestigieuse vitrine de l’excellence du  savoir-faire coutelier Français et remercie les organisateurs pour ce geste d’ouverture.


Je profite de cette opportunité pour vous  livrer tous mes secrets sur mes couteaux primés au XXIII° concours de «Un des  Meilleur Ouvrier de France », mon cheminement et tous les périples survenus. La préparation du concours  MOF commence par la recherche des idées, la réflexion sur leurs développements, faisabilités et mises en pratique.  Pour réaliser des couteaux aussi complexes, Il y a forcément beaucoup de problèmes à résoudre. C’est mon grand défi, surtout qu’auparavant j’avais certes réalisé des couteaux complexes et innovants mais jamais de couteaux multi-lames.


La réflexion et fabrication :

Jamais je n’aurai eu la prétention d’avoir le niveau pour m’inscrire au concours de MOF, ce titre est souvent le couronnement de nombreuses années d’apprentissage et partagé l’expérience de professionnels chevronnés. Pour ma part, rien de tout cela, juste un diplôme BEP mécanicien ajusteur, un esprit logique, intuitif et surtout des mains habiles. C’est la rencontre d’un client passionné de beaux couteaux et très attaché aux valeurs humaines. Mr Jacques Leymarie s’intéressait à mon travail dès mes débuts. Il me commandait chaque année des couteaux de plus en plus complexes à tel point qu’à la réception du denier,  il m’a appelé pour me féliciter de mon travail et m’a suggéré de songer à m’inscrire au prochain concours de Un des Meilleurs Ouvriers de France car ce dernier couteau réalisé était du niveau MOF. Venant de lui, j’ai pris cette remarque au sérieux surtout qu’entre temps il avait téléphoné à mon épouse pour l’inciter à m’encourager dans ce sens car pour lui j’étais le coutelier le plus doué de ma génération.

  Une année de travail est nécessaire à la préparation et fabrication des Œuvres. Dans la classe fabriquant de couteaux de chasse, il était demandé de réaliser un couteau fixe montage plat de semelle, un couteau pliant multi-lames de 15cm fermé avec une lame principale à cran d’arrêt, une lame à éviscérer,  une lame scie et un tire-bouchon. Ce couteau doit être également réalisé non monté afin de voir sa conception. Pour terminer, un troisième couteau pliant multi-lames libre d’inspiration mais avec des difficultés de fabrication. Le cahier des charges est assez évasif mais laisse au moins la place à la créativité ce qui est très important car cette note a un coefficient  très important lors du jugement des œuvres. J’ai réalisé plusieurs fois les trois couteaux dans ma tête, à chaque problème j’apportai ma solution et lorsque je suis arrivé virtuellement au bout du travail, je me suis mis à l’établi pour cette fois fabriquer physiquement les trois couteaux. Tout c’est déroulé parfaitement comme dans ma réflexion. Satisfait de mon travail, il m’a paru nécessaire de confectionner un coffret en noyer massif pour présenter les trois pièces, un double fond étant prévu pour le quatrième couteau en cours de fabrication et le rangement du dossier. Et ce dossier quelle histoire ! Décrire mes idées, le choix des matériaux, l’usage des lames et accessoires et la technique de fabrication pour moi rien de bien spécial, tout était naturel, énuméré en moins d’une page. C’est là que ma belle sœur Lisette est intervenue, ayant  l’habitude des dossiers, elle m’a questionné, chaque détails des couteaux comptent, pourquoi j’avais fait ainsi… et c’est là que je me suis vraiment rendu compte à quel point j’avais poussé la difficulté et réalisé trois couteaux exceptionnels et innovants. Mais le plus surprenant est qu’après avoir réalisé les trois couteaux, le coffret et terminé de rédiger un dossier en béton, je me suis aperçu qu’il manquait quelque chose d’important : les plans des couteaux. J’ai alors réalisé les dessins, côté chaque dimension, pris les photos et les ai insérées dans le dossier.

L’acheminement des œuvres :

Là aussi, quel parcours du combattant, à défaut de commissaire départemental du COET en Ariège c’est le président de la chambre des métiers qui doit assurer l’accompagnement du candidat et au final, l’acheminement des œuvres. Madame la présidente de l’époque ne s’en souciait guère. J’ai donc pris en dernier recours un billet de train, ma valise et mon béret et me voila monté à la capitale pour remettre mes œuvres de concours au Ministère de l’Education Nationale rue Descartes à Paris. Heureusement accompagné par Lisette car elle fut témoin des périples qui ont suivi car si j’avais été seul, personne ne m’aurait cru. Enfin à 16h55 nous arrivons devant la porte de service en charge de réceptionner les œuvres, il faut savoir qu’a 17h tout les bureaux ferment et comme c’était le dernier jour, pour 5 minutes de retard,  il m’aurait fallu attendre quatre années avant de pouvoir candidater pour le concours suivant. Quel soulagement !

La reconnaissance :

Bien sur quel contentement d’avoir décroché ce titre si honorifique et convoité de « Un des Meilleurs Ouvriers de France ».  Le petit coutelier inconnu du fond de l’Ariège venait de se faire un nom et une place dans la cours des grands, il a réussi à imposer sa technique et son style au plus prestigieux jury. Cependant, ma plus grande satisfaction fut l’appel de Mr Pierre Courty (président du jury de la classe coutellerie) m’invitant à participer au prochain jury pour l’évaluation des couteaux du XXIV° concours de MOF en 2011 qui se déroulerait à Thiers, capitale française de la coutellerie. Il m’a fait remarquer que j’avais, par ma technique, ouvert une nouvelle voie dans la fabrication des couteaux, mon expertise serait donc grandement appréciée. Venu de la part de Mr Courty, qu’elle belle reconnaissance de mon savoir-faire ! Lui qui m’a dit un jour en découvrant mon couteau à secret avec tire-bouchon invisible primé au salon de Thiers Coutellia en 2004 puis au Salon International du couteau d’art à Paris en 2005 : « c’est un beau couteau mais ce n’est pas un travail de coutelier, la coutellerie c’est de faire travailler deux lames sur un même ressort ». Alors, lorsque j’ai réfléchi à la réalisation du couteau libre, je me suis inspiré de cette remarque et relevé le défit, en bon Ariégeois têtu je me suis dit : « tu veux deux lames sur un même ressort, et bien moi je vais en mettre trois !!! », merci Pierre et toute mon amitié Jacques.

 

Decouvrez la réplique du couteau pliant libre du concours MOF :

Réplique couteau multi-lames libre concours MOF Tisseyre